Depuis quelques années, la culture d’entreprise est devenue une préoccupation centrale des employeurs et de leurs collaborateurs. En juin 2023, l’agence de design Lonsdale a lancé en partenariat avec OpinionWay « L’Observatoire de la culture d’entreprise ». L'objectif est de connaître l’opinion des salariés sur les différents engagements de leur employeur et de décrypter les enjeux qui en découlent pour les décideurs.
Longtemps délaissée par les cadres dirigeants des entreprises du secteur privé, la culture d’entreprise semble être devenue leur priorité. Selon Julie Jolliot, associée chez Lonsdale, célèbre agence française de branding et de design créée en 1961 : « Je travaille depuis 25 ans sur les problématiques de marque employeur. Ce sujet n’est toutefois que la partie immergée de l’iceberg que représente la culture d’entreprise. ».
Avant l’été 2023, l’agence a diligenté une enquête en collaboration avec OpinionWay. Plus de 2.000 salariés français d’entreprises d’au moins 200 salariés ont été interrogés. Cela a permis d’identifier différents engagements pris par les dirigeants de ces sociétés et d’analyser les enjeux qui en résultent pour eux-mêmes et leurs entreprises.
La culture d’entreprise est un vaste domaine dans lequel experts, patrons et salariés intègrent un peu tout et parfois n’importe quoi. Julie Jolliot l’explique en ces termes : « Pour certains, cette notion est une sorte de Gloubi-boulga dans laquelle ils mettent beaucoup de choses différentes, mais c’est en réalité un levier d’engagement très important des collaborateurs. L’histoire de la société, sa raison d’être, ses actions, les lieux où ses salariés se retrouvent, ses rituels et son modèle d’organisation sont autant de facteurs qui définissent la raison d’être des sociétés. »
La prévalence actuelle du sujet n’est certainement pas due au hasard. Selon, l’ancienne directrice de la communication d’Orange, Béatrice Mandine, qui est aujourd’hui Senior Advisor chez Hopscotch, groupe de lobbying français spécialisé dans le numérique : « La révolution digitale qui a bouleversé le monde du travail, la crise climatique et la crise sanitaire avec ses conséquences directes sur l’essor du télétravail nous ont tous ramené à redéfinir nos priorités et à nous interroger sur le sens que nous donnons à nos entreprises. ». Et le directeur général adjoint d’OpinionWay, Stéphane Lefebvre-Mazurel, renchérit : « La tension sur le marché du travail est un autre facteur important. Aujourd’hui, les salariés ont leur mot à dire et peuvent menacer de partir s’ils n’ont pas les réponses aux questions qu’ils posent. ».
L’Observatoire de la Culture d’Entreprise a révélé des tendances importantes qui intéressent les décideurs à plusieurs titres. Ainsi, bien que 8 salariés sur 10 (79%) soient fiers de travailler dans leur société, un quart d’entre eux expriment leur intention de quitter leur employeur actuel. C’est même 1 collaborateur sur 10 qui en aurait la ferme intention. Aussi, 7 employés sur 10 (71%) qui voudraient changer d’entreprise dans les douze prochains mois avouent que la culture d’entreprise est une des raisons de leur désir d’aller voir ailleurs. D’après Julie Jolliot, « en clair, la rémunération reste le premier levier d’engagement mais la culture d’entreprise représente, elle, une cause de départ ».
La quasi-totalité des salariés sondés (94%) jugent qu’il est essentiel de partager des valeurs au sein d’une organisation. 8 employés sur 10 (83%) estiment également que la raison d’être de certaines entreprises peut susciter leur envie d’y travailler. 3 collaborateurs sur 10 ne savent pas si leur employeur a défini une raison d’être pour leur entreprise. Cette lacune constitue un véritable risque pour l’entreprise. En effet, parmi le quart des salariés (23%) qui considèrent que leur société ne possède pas de raison d’être clairement définie, ils sont plus nombreux à exprimer l’intention de la quitter dans les 12 prochains mois (34% vs 25%). Ils avouent également plus souvent un manque de fierté à travailler dans leur entreprise (63% vs 79%). Stéphane Lefebvre-Mazurel constate : « Les chiffres positifs sont nettement plus élevés dans les structures hiérarchiques horizontales. C’est une chose que nous n’avions pas mesurée dans nos études précédentes. ».
On peut se demander si les employeurs ont parfaitement compris l’importance que la culture d’entreprise revêt aujourd’hui pour leurs collaborateurs. Selon l’opinion de Béatrice Mandine : « La Loi Pacte et le nombre de sociétés qui se dotent d’une raison d’être sont un bon indicateur de ce changement des mentalités. Voir les entreprises donner du temps au temps en se fixant des objectifs sur le long-terme est assez nouveau. ». Et le patron d’OpinionWay se réjouit que cette nouvelle donne « redonne aussi ses lettres de noblesse aux managers ». Julie Jolliot confirme en guise de conclusion que « leur rôle est fondamental, car ils sont la cheville ouvrière entre les décisions stratégiques dictées par la direction et les attentes des collaborateurs ».