Le concept de smart city a été popularisé dans les années 2008 avec l’objectif de permettre aux villes d’être davantage au service des citoyens en s’appuyant sur les technologies de l’information et de la communication. Si des villes comme Lyon ou Rennes revendiquent aujourd’hui ce statut, comment l’arrivée de l’intelligence artificielle peut-elle bouleverser ce concept ?
Ce nouvel élément vient troubler l’univers de la smart city : l’intelligence artificielle (IA). Si pour le moment aucune ville n’use véritablement de cette technologie pour devenir plus « smart », les possibilités offertes par l’IA, même de niveau faible, pour améliorer la gestion des villes sont considérables. Optimisation de la sortie des bennes de poubelles pour les éboueurs dans les immeubles, maintenance prédictive de l’ensemble des infrastructures, éclairage public géré à distance… le fonctionnement actuel de la smart city repose essentiellement sur l’Internet des objets, à travers la pose de capteurs pour mesurer, analyser puis optimiser un service. Si le concept, né en 2008, semble moins faire parler de lui, il n’en est rien, surtout pour les TPE et PME. Les appels à projets des villes, visant à améliorer le confort des habitants sont nombreux. Et comme l’explique le cabinet d’étude Xerfi dans une note, les grands consortiums tels que EDF, Suez, Veolia et Bouygues impliqués dans les principaux projets de villes intelligentes en France, laissent de plus en plus de place aux start-up. La smart city n’est d’ailleurs pas seulement une affaire de grande métropole. Les villes moyennes s’y mettent elles aussi. À Béthune, la commune a construit des logements connectés et développé une application, « Béthune dans ma poche », pour faire remonter des informations identifiées par les habitants. Valencienne met en place depuis plusieurs années un système de vidéosurveillance intelligente. Montpellier utilise la maintenance prédictive pour gérer certaines de ses infrastructures.
Le modèle de la smart city varie en fonction du projet voulu par la commune. La ville de Dijon par exemple, concentre l’essentiel de ses applications sur la réduction de sa consommation d’énergie et la gestion collaborative de la ville. L’objectif est de la faire reculer de 65% d’ici 2030 à travers des capteurs qui pilotent l’ensemble de l’éclairage urbain dans la ville et d’autres applications du même genre. Une plateforme collaborative est mise à la disposition des citoyens pour interagir avec les services publics et signaler un accident ou une dégradation. La ville a ouvert en 2023 près de 108 jeux de données réparties en 9 thématiques sur le portail open data. Stations de vélos en libre-service, aménagements cyclables, évolution de la population, commerces… autant de données dont les citoyens et entreprises peuvent se saisir afin de proposer de nouveaux projets d’innovation.
Lyon, pionnière en matière de smart city, mise davantage sur les nouvelles technologies au service de la ville durable. La métropole est l’une des premières avec le quartier de la Confluence, à développer des smartgrids, un réseau intelligent utilisant les ressources énergétiques de manière optimisée. L’îlot Hikari en est la preuve. Cet ensemble de 12 800 m² de logements et bureaux fonctionne à l’énergie positive. L’ensemble de l’électricité produite vient des panneaux photovoltaïques installés en toiture et en façade. Une pile à combustible permet de stocker l’énergie fournie par le soleil afin de la réutiliser. Le site fonctionne également grâce à une machine à absorption et à la géothermie pour le chauffage et la climatisation. Des capteurs mesurent et adaptent en temps réel la température, les émissions de CO2, l’éclairage et la ventilation à l’intérieur des bâtiments.
À Rennes, la smart city sert les finances de la ville. La métropole, en s’appuyant sur la technologie LoRa (Long Range) pilote de manière plus précise les réseaux de gaz, de chaleur et d’eau dans les bâtiments publics. Rennes prône un numérique responsable. Des capteurs sont installés pour mesurer les ondes électromagnétiques émises par les téléphones portables en temps réel. La métropole a bénéficié de 500 000 euros sur trois ans dans le cadre du plan de relance de l'État pour créer un jumeau numérique de la ville. Cette sorte de maquette 3D doit permettre de mieux visualiser les données échangées dans la ville et se projeter davantage en matière d’urbanisme ou de mobilité. Enfin, la commune met à la disposition des citoyens près de 200 jeux de données issus de la métropole et de partenaires privilégiés comme Citédia, Les Champs Libres, Kéolis, TransMusicales…
Dans son étude sur le marché français de la smart city, le cabinet Xerfi rappelle que les investissements cumulés des 40 premières agglomérations françaises en matière d’infrastructures smart atteignent sur la période 2008-2020 près de 4,4 milliards d’euros pour près de 250 projets. Cependant à l’échelle mondiale, les sommes sont bien plus importantes. Selon le cabinet Mordor Intelligence, le marché de la smart city est estimé en 2024 à 1,36 milliard de dollars et devrait atteindre 3,84 milliards de dollars d’ici 2029, avec une croissance de 23,21% au cours de la période de prévision (2024-2029). Les revenus seront générés par le déploiement de différents types de solutions, comme la gestion intelligente de la mobilité, la sécurité publique intelligente, les soins de santé intelligents, les bâtiments intelligents, les services publics intelligents, la sécurité intelligente ou l’éducation intelligente.