Selon un rapport de l’Ademe, les émissions de CO2 liées au e-commerce et à la livraison de colis en France sont de l’ordre d’un million de tonnes chaque année. Un chiffre colossal, conduisant des start-up à se lancer dans la livraison collaborative. L’objectif affiché est de verdir le secteur.
Elles s’appellent Tut Tut, Pick Me, Yper ou encore Welco et révolutionnent depuis quelques années le secteur de la livraison. Ces start-up se spécialisent dans la livraison collaborative. Il s’agit d’un nouveau mode de livraison, visant à réduire l'empreinte carbone liée au transport de marchandise. L’idée est de faire appel à des réseaux de particuliers ou d’entreprises; ces derniers utilisent leurs trajets existants, ou planifiés spécifiquement, pour transporter des colis en direction de leur destination finale. Plusieurs solutions sont à l’œuvre. Il existe par exemple le covoiturage de colis, comme le propose la start-up Cocolis. Dans cette configuration, un particulier transporte un colis pour le compte d’un autre individu ou d’une entreprise, contre une rémunération financière, sur un trajet qu’il avait déjà prévu d’effectuer.
Ce nouveau modèle de livraison gagne en popularité auprès des investisseurs. En 2023, la start-up Pickme a annoncé une levée de fonds de 3,5 millions d’euros. La jeune pousse mise sur un modèle alternatif, en développant un réseau de point relais chez les particuliers. Les clients se font ainsi livrer directement chez leur voisin, qui en échange perçoit une rémunération au moment de la réception du colis. Pickme dispose d’un réseau de 150.000 «voisins relais», partout en France.
Toutefois, en la matière, la start-up Shopopop est dominante sur le marché. Lancée en 2016, elle est parvenue à boucler une levée de fonds de 20 millions d’euros en 2021. L’entreprise s'adresse directement aux enseignes de la grande distribution, aux grandes surfaces spécialisées, aux fleuristes ou aux commerces indépendants ayant des clients à livrer. La tâche est accomplie par des particuliers, qui profitent de leur trajet quotidien pour en livrer d’autres. Ces coursiers font également le trait d’union entre les magasins. Fort de son succès en France, le service est disponible depuis quelques années en Allemagne, en Espagne, en Italie ou encore en Belgique. Si les start-up sont de plus en plus nombreuses, elles restent encore peu connues du grand public.
Dans un sondage BVA publié en avril 2024 , seuls 34% des personnes interrogées connaissent les plateformes de livraison collaborative. 82% des sondés estiment qu’il s’agit d’une alternative aux services de livraison classiques mais seuls 65% pensent la livraison collaborative comme une solution d’avenir. Enfin, 86% d’entre eux estiment que cette solution est avant tout un moyen d’arrondir ses fins de mois pour les particuliers. Le complément de revenus généré par le fait de livrer ou stocker un colis peut être conséquent. La Plateforme Pickme estime ainsi qu’il est possible de gagner jusqu’à 300 euros par mois. Le dédommagement moyen sur Shopopop est de 6 euros par trajet.
Ces entreprises surfent sur l’économie du dernier kilomètre. Le terme désigne le dernier maillon de la chaîne logistique de la distribution. Dans une étude publiée sur le sujet, le cabinet Businesscoot rappelle que le dernier kilomètre peut représenter jusqu'à 55% du coût total de livraison. La marge d’amélioration est donc conséquente. Le marché mondial du dernier kilomètre doit ainsi connaître un taux de croissance annuel mondial de 10% entre 2024 et 2033, toujours selon Businesscoot.
L'Amérique du Nord est la région dominante, mais c'est en Asie-Pacifique que les perspectives de croissance sont les plus importantes. En France, le marché est également très dynamique avec une forte croissance : 73,3% entre 2021 et 2025. De fait, les Français expédient ou reçoivent de plus en plus de colis. Selon les données de l’Autorité de Régulation des Communications Électroniques, des Postes et de la distribution de la Presse (Arcep) en 2023, les envois de colis distribués en France et exportés augmentent de 4,3% en un an, et s’élèvent au total à 1,7 milliard. Cette hausse est plus soutenue s’agissant des envois destinés à l’export (+5,4%) et des colis importés (+5,8% en un an).
Selon le cabinet FT consulting, le secteur e-commerce a progressé de 10,5% en France en 2023, soit plus que la moyenne européenne (8%). Le marché hexagonal, porté principalement par le textile, se rapproche des 1.000 milliards d’euros. Cette croissance est amenée à se poursuivre à un rythme similaire dans les années à venir, laissant place à un défi tant logistique qu’écologique. En effet, l’Ademe rappelle que les émissions de carbone de ce secteur d’activité en France sont de l’ordre d’un million de tonnes par an. 25% du CO2 émis en ville est dû au transport de marchandises. Les émissions moyennes de Gaz à Effet de Serre (GES) d’un colis sont de l'ordre de 1kg CO2e. Elles peuvent être réduites. Dans un premier temps, en ajustant mieux la taille des colis, pour permettre aux transporteurs de gagner de la place dans leur véhicule et de réduire en conséquence le nombre de trajet à réaliser. Selon l’Ademe, on note en moyenne 50% de vide dans un colis.