Entre 2013 et 2023, le nombre d’espace de coworking en France a été multiplié par dix, selon les données du cabinet Businesscoot. Ces lieux témoignent des mutations en cours dans la société et misent sur l’innovation pour attirer de nouveaux travailleurs. À quoi vont ressembler ces espaces demain ? Comment se porte le marché ? Qui sont les acteurs dominants ?
Le coworking se répand partout en France, y compris dans les régions moins dynamiques, comme dans le Pays de Blèves, en Dordogne. Depuis le 17 janvier 2025, on y trouve un espace de coworking d’une cinquantaine de places, réalisé par la société Bordelaise Héméra. Quelques jours plus tard, à Poligny dans le Jura, l’Annexe ouvre un espace de 70 m² dédiés au coworking. Les capitales mondiales (Paris, Londres, New York) et les grandes métropoles régionales de notre pays (Nantes, Bordeaux, Marseille…), ne sont plus les seules à se laisser tenter par ces nouveaux espaces de travail partagés. Selon une étude du cabinet Businesscoot, le taux de croissance annuelle moyen pour l'ouverture de nouveaux espaces de coworking serait de 21,3% sur la période 2015-2022, dans le monde. En France, les espaces de coworking ont été multipliés par 10 de 2013 à 2023. Le marché s’est d’ailleurs consolidé au fil du temps autour de 3 acteurs de référence en France : IWG (218.385 m² pour 141 espaces), Morning (127.568 m² pour 50 espaces) et WeWork (106.208 m² pour 12 espaces). Dans son baromètre de 2024, UbiqData rappelle que la France compte 1.191,315 m² de surface de coworking répartis sur 3591 espaces, dont 91.441 m² ouverts en 2024.
Le succès du coworking montre l’engouement pour les bureaux dits «flexibles», en France. Toujours selon l’UbiqData 2024, de janvier à septembre 2024, la demande en bureaux flexibles à Paris s'élève à 149.600 m² en tout. Ils sont répartis entre 81.200 m² de coworking et 68.378 m² de bureau opéré (espace de travail loué à une société, avec des prestations de services). De plus, le coût relativement abordable des espaces de coworking contribue à rendre ces lieux attractifs pour les jeunes entreprises ou les travailleurs indépendants.
Les montants varient en fonction de la superficie louée, de la présence de bureaux fermés ou non et de la ville. À Paris, le coût mensuel moyen par poste est estimé, d’après UbiqData à 714 euros en 2024. Il est à 444 euros à Lyon, 394 euros à Bordeaux et 369 euros à Marseille. Le marché est d’ailleurs en pleine recomposition. En France, Industrious vient de fermer près de 20.000 m² de bureaux. WeWork est en dépôt de bilan aux États-Unis et au Canada depuis la fin d’année 2023 : il a perdu près de 26.000 m² à Paris. Cependant, les nouveaux acteurs montrent que le secteur du coworking a encore de beaux jours devant lui. Newton Once dépasse désormais les 60.000m² d’espaces exploités et Morning vient d’atteindre le cap symbolique des 50 adresses à Paris.
L’industrie est en pleine mutation. Bousculés par l’arrivée de l’intelligence artificielle et de l’internet des objets (IoT), les espaces de coworking de demain sont à réinventer. La réservation de salle, le contrôle d’accès ou encore la maintenance prédictive des espaces pourraient à terme être automatisés grâce à l’intelligence artificielle. Grâce aux capteurs d’IoT présents un peu partout dans les espaces de travail, des données seraient compilées afin d’optimiser l’aménagement des espaces en fonction des besoins des usagers et d’éviter le gaspillage d’énergie. Les fonctions de chauffage, de ventilation ou encore de climatisation seraient optimisées en temps réel, réduisant ainsi la consommation énergétique et l’empreinte carbone des bâtiments. Les espaces faisant fusionner coliving et coworking sont aussi des aménagements qui tendent à se développer dans les grandes villes. C’est le cœur de l’activité de Babel Community, avec ses opérations immobilières. Il existe également de nouvelles tendances, comme l’arrivée d’espaces de coworking dits «de niche», comme Le Studio, à Bourges. C’est un espace de coworking 100% féminin, pensé par et pour les femmes uniquement.
La principale concurrence du coworking est la tendance du bureau opéré. Ce terme désigne les espaces de travail privés, loués avec un contrat de prestation de services. C’est une solution clé en main, largement inspirée du coworking. Le bail est flexible et peut être réduit à quelques mois. Les bureaux sont fonctionnels et aménagés. L’entreprise ne paie ni l’eau ni l’électricité. En externalisant la gestion de ses espaces, elle optimise ses coûts. Avec plus de 350.000m² en 2024, selon les données d’UbiqData, les bureaux opérés gagnent en importance. Le modèle séduit tout particulièrement les startups et PME manquant de visibilité sur le long terme. La capitale concentre à elle seule 61% des surfaces exploitables. Parmi les principaux acteurs sur ce marché, on trouve à la première place l’entreprise Deskéo (73.514 m² pour 64 adresses), suivie par Insitu (52.281 m² pour 11 adresses ) et MyFlex Office (33.835 m² pour 92 espaces). Tout comme le coworking en son temps, le bureau opéré se développe petit à petit en région. Les premiers espaces à Lyon, Bordeaux, Lille ou Marseille commencent à voir le jour. À Paris, le prix moyen d'un bureau opéré est de 965 euros par mètre carré par an et par poste.