Malgré la popularisation du paiement sans contact par carte bancaire ou depuis un téléphone portable, les Français restent attachés à l’argent liquide. Selon un sondage IFOP réalisé en décembre 2024, 69% des Français continuent d’utiliser des espèces au quotidien. Dans le même temps, de plus en plus de pays en Europe et ailleurs délaissent les pièces et les billets. Quels sont les pays où les espèces se font rares ? Quelles sont les conséquences pour l’économie ? Quel regard les Français portent-ils sur le paiement sans contact ?
Les Français toujours très attachés à l’argent liquide. C’est le constat que l’on peut tirer d’un sondage IFOP réalisé en décembre 2024, où 69% des personnes interrogées disent utiliser des espèces au quotidien. Ce mode de paiement reste privilégié, notamment pour payer les petits commerçants (83% des sondés) ou pour verser des étrennes (71%) et donner de l’argent à ses proches (67%). 77% estiment être une bonne idée de constituer des enveloppes d’espèces en début de mois pour gérer son budget. Enfin, 94% des personnes interrogées disent toujours avoir du liquide sur elles. La somme moyenne constatée serait de 55 euros. Malgré des résultats en faveur de l’argent liquide, le sondage rappelle aussi que 94% des paiements sont réalisés par carte bleue. Ainsi, la France s’inscrit dans une tendance européenne plus globale, selon les chiffres présentés par la Banque centrale européenne en décembre 2024 sur les comportements des consommateurs en matière de paiement dans la zone euro. En nombre de paiements, les espèces sont utilisées aux points de vente dans 52% des opérations en 2023, contre 59% en 2022.
Le nombre de paiements dématérialisés croît. La carte bleue représente 48% des opérations. Elle est suivie par les autres moyens de paiement électronique : les portefeuilles en ligne ou les applications mobiles représentent 29% des opérations. Par ailleurs, 55% des consommateurs disent préférer payer leurs achats en carte bleue. Ces données poussent l’Union européenne à avancer sur la question de l’euro numérique.
Cette monnaie virtuelle viendrait compléter les autres moyens de paiement et pourrait être développée sur le Vieux Continent dès 2027. Contrairement aux cryptomonnaies, cet euro virtuel serait garanti par la Banque centrale européenne. Les travaux pour le déploiement de cette nouvelle monnaie sont en cours depuis 2023. L’acceptation par les entreprises de l’euro numérique sera rendue obligatoire, sauf dérogation sous certaines conditions (chiffre d’affaires faible, peu de salariés, micro-entreprise…). Les commerçants seront eux aussi tenus d’accepter la monnaie virtuelle. Cette innovation pourrait signer la mort des espèces.
Dans l’Union Européenne, de nombreux pays (notamment du nord de l’Europe) ont presque totalement renoncé aux espèces. En Suède, les distributeurs de billets de banque sont de plus en plus rares. Le paiement par carte ou avec son téléphone est quasiment la norme. Depuis 2012, quelque dix millions de suédois recourent exclusivement à l’application Swich pour régler leurs achats. Certains commerces n’acceptent plus d’argent liquide. En Norvège, selon une compilation de données issues d’Eurostat, de la Banque Mondiale et d’autres banques, il existe seulement 27 distributeurs de banque pour 100.000 habitants. À titre de comparaison, en France, ce nombre est de 93. Le pays du nord de l’Europe est suivi de près par la Finlande (36 distributeurs pour 100.000 habitants) et le Danemark (41 distributeurs pour 100.000 habitants).
Le nombre d'usagers des outils numériques croît, mais les États conservent des garde-fous pour protéger les personnes peu à l’aise avec le numérique. Selon les données de l’Insee, 15,4% des personnes de 15 ans ou plus résidant en France sont en situation d'illectronisme en 2021. Ainsi, elles sont en difficulté voire en incapacité d’utiliser ou de créer des ressources numériques, en raison d'un manque ou d'une absence totale de connaissances à propos de leur fonctionnement. 13,9% des Français n'ont pas utilisé Internet au cours des trois derniers mois et 1,5% l'ont utilisé mais ne possèdent pas les compétences numériques de base. À cela, s'ajoutent les personnes en grande difficulté économique. Ainsi, en 2020, la Suède a fait voter une loi obligeant les banques suédoises à assurer l'approvisionnement d'un niveau suffisant de services pour obtenir de l'argent liquide. Le texte prévoit aussi que chaque habitant doit pouvoir retirer de l’argent liquide à moins de 20 km de chez lui, y compris ceux qui résident dans des zones reculées. La mesure a contraint les banques à devoir réinstaller des distributeurs dans les villages. La guerre en Ukraine joue également un rôle dans l’évolution des mentalités vis-à-vis des espèces. En mars 2024, une cyberattaque d’un groupe de hackers russes sur un data center suédois a perturbé les systèmes de paiement en ligne. En novembre de la même année, une brochure envoyée à l’ensemble des Suédois indiquait qu’en cas de crise ou de guerre, il est nécessaire de conserver des espèces. Depuis le 1er octobre 2024, la Norvège délivre des amendes aux commerçants refusant les paiements en espèces. Une voie que la Suède souhaite aussi emprunter.